Le 8 novembre dernier au Tim Hortons Field, à Hamilton, les spectateurs venus assister au match opposant les Tiger-Cats aux Alouettes de Montréal ont été les témoins privilégiés d’une page d’histoire. En effet, avant que les footballeurs ne prennent le terrain d’assaut, quatre vétérans de la Seconde Guerre mondiale ont été décorés par le consul général de France en poste à Toronto. La foule, gonflée d’enthousiasme, a bruyamment manifesté son soutien et sa gratitude à ces hommes qui sont parmi les derniers à pouvoir témoigner de ce qui s’est passé lors de la libération de la France.

Au-delà du jour du Souvenir, qui chaque année remet l’histoire militaire à l’avant-plan de l’actualité, c’est la commémoration de cet évènement particulier qui a motivé le gouvernement français à saluer la contribution des soldats canadiens. « On est dans le cadre du 70e anniversaire du débarquement de Normandie et c’est une étape essentielle de notre histoire moderne », explique le consul général de France à Toronto, Jean-François Casabonne Masonnave. Après quatre années d’occupation nazie, la France était sur le point de se relever grâce aux efforts de nombre de ses enfants, mais grâce aussi aux sacrifices considérables d’une coalition d’alliés. « Nous voulons manifester de la manière la plus forte notre reconnaissance et aussi que nous n’oublierons pas », commente le consul.

Larry McDermott, Ken Gawthorn, Bob Post et Harold Schaus ont ainsi été faits Chevalier de la Légion d’honneur. C’est en juillet 1944 qu’ils posèrent le pied sur le sol français où ils participèrent à plusieurs batailles. Kathleen Wynne, première ministre de l’Ontario, et David Patterson, brigadier-général et commandant adjoint de la 4e Division du Canada, étaient présents à la cérémonie.

Ce n’est pas le premier évènement du genre auquel M. Casabonne Masonnave participe. Il n’est pas inhabituel pour un diplomate de décerner, au nom de son gouvernement, des médailles à des citoyens d’autres nationalités. Cependant, les hommages militaires se sont distingués cette année par l’ampleur et les circonstances qui les justifiaient. D’autres cérémonies ont eu lieu en Ontario, dont une en présence du président François Hollande lors de son passage à Ottawa au début du mois. Les vétérans qui sont décorés ont été sélectionnés par le ministère canadien des Anciens combattants et par le gouvernement français. Ces cérémonies ont pris diverses formes au cours des derniers jours, en fonction de la disponibilité des récipiendaires ou de leur désir de conserver un caractère intimiste aux démonstrations de gratitude qui leur étaient adressées.

À l’heure où la grande majorité d’entre eux sont nonagénaires, la question de la transmission de leur témoignage et la préservation du souvenir de leurs camarades morts au combat se fait plus insistante. « L’une des dimensions de cet hommage rendu aux vétérans, c’est de les assurer de la continuité », assure Jean-François Casabonne Masonnave. Le consul prend pour exemple la commémoration du 100e anniversaire de la Première Guerre mondiale, un exemple parfait d’un évènement aujourd’hui trop lointain pour que des témoins puissent en parler mais dont la mémoire n’en est pas moins vive dans la population.

De la même façon que la Guerre de 1914-18 est aujourd’hui confinée aux livres d’histoire, il n’y aura un jour plus personne pour raconter de vive voix son expérience de soldat entre 1939 et 1945. Le mois de novembre est propice à la commémoration des morts mais rien n’empêche de célébrer les vivants, à plus forte raison si leur vécu peut être offert en exemple. « Chacune de ces cérémonies est toujours extrêmement émouvante pour tout le monde », confie le consul général de France à Toronto, qui fait remarquer une chose : les vétérans remercient toujours ceux qui leur témoignent honneur et attention alors que ce sont plutôt les officiels et les organisateurs de ces cérémonies qui ont envie de leur dire « merci ».

Photo : Kathleen Wynne et le consul Jean-François Casabonne Masonnave en compagnie des vétérans décorés au Tim Hortons Field à Hamilton