Richard Caumartin

La communauté congolaise de Hamilton s’est réunie le 6 avril dans la salle paroissiale de l’église Notre-Dame du Perpétuel-Secours pour un gala mettant en vedette la langue française. En effet, le français était au cœur des discussions d’un panel d’intervenants communautaires qui ont partagé l’importance de la langue française dans la société canadienne d’aujourd’hui.

La soirée « Le français dans nos foyers » était animée par la directrice gestionnaire de la communauté congolaise de la région, Nancy Muinda-Ishibola. Le mot de bienvenue, Nanou Kalombo qui a abordé l’importance de parler français à la maison.

« Nous savons tous que les réalités linguistiques sont un défi au quotidien dans nos écoles, dans nos familles ou dans nos rencontres sociales. Selon le recensement de 2021, le français est la langue maternelle de 6195 résidents de Hamilton et la République démocratique du Congo est le premier pays source de l’immigration francophone, suivi de la France et d’Haïti. Nous assistons actuellement à une mondialisation des échanges intensifiant la langue anglaise. Cette réalité met la langue française en risque de disparaître à Hamilton, du moins dans les communautés ethnoculturelles de la municipalité. Si nous ne faisons rien pour la préserver ou la promouvoir, il ne nous restera plus rien », affirme Mme Kalombo.

Ce cri du cœur un peu alarmiste reflète néanmoins une certaine réalité de la situation linguistique non seulement à Hamilton, mais dans toutes les grandes villes du Centre-Sud-Ouest. Au cours des cinq dernières années, les Congolais ont noté une baisse significative de l’usage du français comme première langue d’enseignement par les familles issues de la population francophone minoritaire d’origine africaine.

« Cet état de fait ne facilite pas une meilleure intégration des nouveaux arrivants, dont la plupart se retrouvent au carrefour des langues française et anglaise, et finissent par abandonner le français au profit de l’anglais.

« En 2022, nous avons identifié une dizaine de familles avec quatre enfants, en moyenne, au sein de la communauté congolaise de Hamilton qui ont décidé de changer la langue d’enseignement de leurs enfants pour l’anglais. Il est vrai que nous sommes minoritaires dans cette ville et cette situation constitue un défi majeur.

« Il faut compenser ce déficit par une visibilité permanente avec des promotions et autres activités qui ciblent les résidents congolais pour apprécier et être fiers de parler et d’utiliser le français comme moyen de faciliter le développement ou une meilleure intégration », conclut Nanou Kalombo.

Ce témoignage a été suivi de témoignages d’invités qui appuient les efforts de francisation de la communauté, dont Ghayt El Gouach, agent de projet des Communautés francophones accueillantes (commanditaire du gala), et Frédéric Bergeron, surintendant de l’éducation au Csc MonAvenir.

Puis, avant le souper et la danse, les panélistes ont débattu du sujet du jour. Il s’agissait de Sylvie Korolenchuk (cofondatrice de la fondation Mwinda en RDC), Hugues Hervé Kenhefa (vice-président de la communauté camerounaise), Darling Alexandre (Haïtienne enseignante au secondaire), Chairh Guei (Ivoirienne gestionnaire au Collège Boréal), Didier Mpiana (professionnel dans le domaine des nouvelles technologies pour le Cs Viamonde), Micheline Kinzola (Congolaise et employée du Centre francophone du Grand Toronto) et Hilda N’sele Mukele (Congolaise et travailleuse avec les enfants ayant des besoins particuliers).

La préservation de la langue française dans un milieu multiculturel était au cœur des divers témoignages et pour conclure la discussion, tous étaient d’accord sur le fait que l’avenir de la langue française passe par l’Afrique dont 500 millions d’Africains parleront le français d’ici 2030. Il reste important pour les parents d’enseigner la langue maternelle aux enfants issus des diverses communautés culturelles et de conserver le français à la maison comme deuxième langue.

« Le renforcement de l’identité culturelle est primordial pour que les jeunes s’identifient à la communauté franco-ontarienne », insiste M. Kenhefa.

« Nous voudrions que la langue française devienne un réflexe naturel chez nos enfants. Nous devrions communiquer avec eux en français et les intéresser à lire dans cette langue qui est pour chacun d’entre nous un capital culturel. Nous devrions demander d’avoir plus de livres de langue française dans les bibliothèques publiques », ajoute Mme Alexandre.

En conclusion, les médias sociaux jouent un rôle prédominant dans l’anglicisation des enfants issus de l’immigration francophone. Les panélistes s’entendent sur le constat qu’il devrait y avoir plus d’opportunités sur les médias sociaux pour que les jeunes puissent s’exprimer en français. Il faudra créer plus d’applications intéressantes en français, des groupes de discussion et de la lecture en ligne pour les jeunes francophones.