L’an dernier, les deux compères avaient connu beaucoup de succès auprès du public du Centre-Sud-Ouest ontarien. C’est donc sans hésitation que les clubs d’aînés et autres organismes les ont invités à nouveau et les francophones de la région n’ont pas hésité davantage à venir voir leur spectacle. Avec la pièce Il était une fois Delmas, Sask…. mais pas deux fois, les comédiens André Roy et Gilles Denis ont à nouveau offert une prestation empreinte d’humour et d’émotions et truffée de références à la culture canadienne-française.

Dans la région couverte par Le Régional, deux représentations ont été offertes : à Cambridge le 7 avril et à St. Catharines le 9 avril. Le public, largement composé de personnes âgées puisque la tournée était en partie commanditée par la Fédération des aînés et des retraités francophones de l’Ontario, s’est non seulement diverti mais reconnu, car la pièce porte sur la réalité vécue par les petites communautés francophones disséminées au Canada anglais.

MM. Roy et Denis étant originaires des Prairies, ce n’est cependant pas en Ontario que le récit se déroule mais, comme le révèle sans détour le titre de la pièce, dans un petit village de la Saskatchewan. C’était, pour l’essentiel, sur les épaules d’André Roy que la prestation reposait. Celle-ci prenait la forme d’un monologue livré à l’adresse des spectateurs, l’interprète principal racontant la vie de sa communauté par le biais de souvenirs de jeunesse. Gilles Denis se présentait sur scène de temps à autre pour interpréter brièvement un personnage au gré du récit : un Autochtone, un voisin, un prêtre, etc.

Les anecdotes se succédaient à un rythme rapide et racontaient l’histoire de Delmas, principalement du milieu des années 1950 au milieu des années 1970. Les situations comiques se succédaient mais, en filigrane, se dessinait aussi une critique sociale livrée avec un brin d’angoisse : celle de la perte du français en milieu minoritaire. « I can tell you the whole story in English! Everybody understand English, right? », a lancé André Roy au début de la pièce, parodiant l’habitude des francophones de passer à l’anglais dès qu’un anglophone se trouve parmi eux. Et le comédien d’ajouter, résigné : « On est aussi bien de se parler en français… pendant qu’on le peut encore ».

De l’enfance à l’âge adulte en passant par les études au Collège de Saint-Boniface, au Manitoba, et au Collège Saint-Jean à Edmonton, en Alberta, des lieux de passage obligé pour les jeunes francophones des Prairies désireux de parfaire leur éducation en français, l’histoire retraçait le parcours typique de la génération des deux protagonistes. Quelques autres repères sociohistoriques ponctuaient le récit, tel les pensionnats autochtones et la destruction du patrimoine religieux dans le sillage du concile Vatican II.

« Pourquoi je vous parle de Delmas plutôt que d’un autre petit village? Je pense qu’il faut que tu parles de quelque chose que tu comprends pour être compris », a commenté André Roy au terme de la pièce. Au cours de celle-ci, des chandelles étaient éteintes au fur et à mesure que le français disparaissait ou que s’éteignait une personnalité aimée du personnage principal. À la fin, une seule chandelle demeurait allumée, symbolisant l’espoir de voir la culture fransaskoise survivre aux vicissitudes de la modernité.

Voilà en effet un voeu que pourrait formuler les francophones d’un océan à l’autre en fonction de leur communauté.

PHOTO: Gilles Denis (à gauche) et André Roy sont présentement en tournée.