Les communautés catholiques de Welland, St. Catharines, Port Colborne ainsi que Niagara Falls ont célébré les 40 ans de sacerdoce du père Beaulieu, le dimanche 3 juin, dans la salle paroissiale du Sacré-Cœur.

Après cinq ans d’exercice dans le Niagara, le curé des paroisses du Sacré-Cœur, Immaculée-Conception, Saint-Jean-de-Brébeuf et Saint-Antoine-de-Padoue s’apprête, cet été, à tourner une nouvelle page de sa longue carrière au service de l’Église.

Que ce soit dans l’armée, en prison ou en contexte minoritaire, au cours des quatre dernières décennies, le natif de Notre-Dame-du-Lac (Québec) a vécu des situations auxquelles rien ne le prédestinait, selon lui.

« J’étais timide, je ne me voyais pas là-dedans, glisse-t-il. Je n’ai pas eu de phénomène à la Saint-Paul où tout à coup tout s’illumine. Ça s’est précisé dans mon quotidien le plus ordinaire. J’ai grandi dans une famille pauvre et pieuse au sein de laquelle chacun avait des responsabilités envers les autres. » Imprégné de ce climat de prière et du respect de l’Église, il dit avoir toujours cherché à quel endroit il pouvait servir le mieux tout en exerçant ses talents.

Fasciné par le mystérieux, le religieux, il a étudié la théologie à l’Université Laval de Québec avant d’intégrer le programme de formation pour devenir prêtre. « J’ai risqué d’ouvrir la porte », sourit-il, faisant référence à un passage de la Bible, Apocalypse de Jean.

Nommé au bureau de l’évêque en 1978 comme secrétaire puis directeur diocésain, responsable des cérémonies et de l’évaluation des futurs prêtres, l’abbé Beaulieu bascule dans un tout autre univers en 1986 au sein des Forces canadiennes. «  C’était le temps que j’aille ailleurs pour enrichir ma formation, lance-t-il. Je voulais travailler avec des jeunes dans un milieu homogène, organisé, à but précis, dans un cadre œcuménique. J’ai appris l’anglais par moi-même et voyagé à travers le pays comme à l’étranger lors des déploiements. »

« sur le tarmac, Aider les familles à trouver du sens a été une des épreuves les plus bouleversantes. »

Des confins de l’Arctique canadien à la Corne de l’Afrique, en passant par la base navale d’Halifax, le major Beaulieu a servi comme aumônier dans l’Air et la Marine durant 18 ans en uniforme avant d’être rappelé sous contrat pour une période qui restera une des plus douloureuses à vivre.

« J’ai présidé une quinzaine de cérémonies de rapatriement des corps, sur le tarmac de la base de Trenton, durant la guerre en Irak. Aider les familles à trouver du sens au moment du retour de leur personne aimée a certainement été une des épreuves les plus bouleversantes. »

Dans un climat de guerre, il y a pourtant eu aussi des moments de joie intense comme célébrer la messe de minuit à bord du porte-hélicoptères d’approvisionnement canadien au large de la Somalie. « Nous étions à quelques centaines de mètres de la côte. Devant nous, plongée dans le noir le plus total, s’étendait une ville de plus de 500 000 habitants, ravagée par la guerre civile et la famine. »

Une autre expérience inoubliable dans un ministère tout aussi particulier fut certainement celle de son passage à la Warkworth en 2006. Dans la chapelle de ce centre de détention de 600 prisonniers, l’aumônier dit avoir célébré les plus simples et les plus belles messes de Noël, sans souliers ni fastes. « Ce fut une expérience d’humilité intense. Face à des blessés de la vie et dans leur âme qui ont écopé de sentences lourdes, on redécouvre pourquoi il est difficile de donner ce que on n’a pas reçu. Quand on a appris à haïr plutôt qu’à aimer, ça finit par déborder. »

La culture francophone et le bilinguisme du père Beaulieu sont une denrée rare dans le Niagara dont l’évêque de St. Catharines a grand besoin pour servir les Canadiens français. C’est ainsi qu’à partir de l’été 2013, l’abbé Beaulieu arrive à Welland. « Je voulais être deuxième ou troisième vicaire mais avant même d’arriver, j’avais été nommé curé. »

Après l’armée et la prison, le père Beaulieu connaît une nouvelle forme de vulnérabilité : la francophonie en milieu minoritaire. « Il m’a fallu trouver des documents et bâtir des rituels qui n’étaient pas bilingues car tout le monde au sein de la communauté connaît quelqu’un de l’autre langue qu’il faut être en mesure de rejoindre. »

Le prêtre décrit un fragile équilibre et un glissement inexorable vers la langue anglaise : « La pression subie par la minorité dans une majorité fait que, automatiquement dans un couple, quand un des deux conjoints est anglophone, ils vont aller dans une paroisse anglophone. »

« On a pu compter sur des gens d’une grande générosité et d’une belle détermination dans le niagara. »

Pour consolider la communauté, il alors concentre son attention sur les écoles catholiques francophones, rouage essentiel du mécanisme de formation et de construction de la communauté. « L’avenir demeure sur notre capacité à intégrer les familles bilingues, en leur offrant des bons services de sacrement, y compris en anglais », affirme celui qui doit servir plusieurs paroisses, autre spécificité du milieu minoritaire.

Entouré d’une équipe de quelques employés et de beaucoup de bénévoles, ce gestionnaire avisé soucieux du moindre détail entreprend de colossaux travaux en 2015. « La démolition de l’ancienne église, la construction du stationnement et des marches de l’entrée principale furent une grosse responsabilité à prendre car très lourde de conséquences à long terme. On venait tout juste d’effacer une dette et on a dû s’endetter à nouveau. On a pu compter sur des gens d’une grande générosité et d’une belle détermination. »

C’est avec la même détermination que la paroisse continue de lancer des initiatives particulièrement en direction des rencontres sociales qui dépassent le cadre religieux et alimentent la culture francophone. « C’est la continuité de bientôt 100 ans d’une communauté qui n’a pas démordu de sa foi, malgré de grands changements, clame Julien Beaulieu. Que ce soit à Welland, St. Catharines, Niagara Falls ou Port Colborne, la communauté gravite toujours autour de son église et continue d’écrire la belle histoire d’un petit groupe de francophones minoritaires guidés par l’abbé Tanguay. »

Galerie photos : Près de 300 paroissiens ont célébré le 40e anniversaire de sacerdoce du père Beaulieu.