Le ciel était tout gris en ce jour quatrième jour d’une campagne de sensibilisation aux sans-abri. Comme si cela ne suffisait pas, une fine et froide pluie s’est abattue, toute la journée, sur la ville de St. Catharines balayant du coup le semblant de chaleur apportée ces derniers jours par des températures au-delà des 15 °C et qui laissaient déjà penser à l’arrivée précoce du printemps.
L’ambiance maussade était accentuée par un brouillard qui s’épaississait au fur et à mesure que l’on escaladait la petite montée menant au campus de l’Université Brock. À l’université même, le brouillard a rendu la visibilité quasi nulle au-delà des 50 m. Pourtant, le campus vaquait paisiblement à ses activités quotidiennes, avec ses allées et venues d’étudiants et autre personnel scientifique et administratif. Le tout dans de vrombissements de moteurs de véhicules et autobus.
Tout semblait normal. Pourtant, c’est dans cette ambiance et ce climat, qui rappelle que l’hiver est encore là, que des étudiants ont décidé de déserter, volontairement, le confort des résidences ou de leurs foyers pour partager la dure expérience des sans-abri en vivant, pendant cinq jours (soit du 7 au 11 mars), dehors assis ou couchés sur des cartons ou dans des sacs de couchage posés à même le sol. L’action se déroule dans le cadre d’une campagne, devenue une tradition, de sensibilisation aux problèmes des sans-abri et collecte de fonds, de vêtements et de nourriture à remettre à Community Care.
Parmi les étudiants engagés dans cette campagne initiée par l’Association des étudiants de la Goodman Business School, et dont l’objectif est de récolter au moins 15 000 $, se trouve Chantal Wiesner, étudiante de troisième année. La jeune fille, qui s’exprime parfaitement en français, est à sa première expérience dans cet acte d’altruisme. Quand on lui demande le pourquoi de ce sacrifice, c’est avec un large sourire qu’elle répond sans hésiter : « Nous sommes des privilégiés… souvent nous oublions qu’autour de nous, dans notre communauté, il y a des gens qui sont en manque de tout, en commençant par un endroit où dormir lorsque la nuit tombe. C’est pour ces gens-là que je suis là ».
Pendant qu’elle parle, ses voisins de couchette – comme Jackie Close, étudiante de la quatrième année qui en est à sa troisième participation à cette campagne appuient avec de grands mouvements de tête. Au-dessus de leurs têtes se trouve placardé un écriteau laconique sur du carton disant (en anglais) « Nous avons des lits, nous avons des maisons, nous faisons ceci pour ceux qui n’ont rien ».
Cependant, la participation volontaire à cette campagne ne dispense pas les étudiants de leurs obligations académiques. Ils vont aux cours et font leurs travaux. Seulement, pendant cinq jours et cinq nuits, ils vivent à la belle étoile avec, pour seuls décors, un mur, des sacs de couchage, des cours et un strict minimum d’effets personnels pour se protéger, tant soit peu, contre les intempéries. Autres sacrifices et non des moindres : pas de bain ni douche, pas de chauffage, pas de repas copieux, pas de téléphone portable.
Photo: Pendant 5 jours, des étudiants ont déserté le confort des résidences pour dormir à la belle étoile afin de recueillir des fonds pour les sans-abri.