Le 10 mai, à Hamilton, un atelier d’art inédit a permis aux nouveaux arrivants francophones d’évacuer les tourments rencontrés dans leur parcours d’immigration. L’activité de guérison avait pour objectif de favoriser le bien-être émotionnel essentiel à une bonne implantation et un bon épanouissement au Canada.

Yolande Melono – IJL Réseau.Presse – Le Régional de Hamilton-Niagara

La peur, la solitude et le stress comptent parmi les principaux obstacles à une intégration réussie des immigrants francophones au Canada. Pour les nouveaux arrivants congolais, les défis sont encore plus grands : en plus des difficultés liées à leur établissement dans un nouveau pays, ils portent souvent les blessures psychologiques laissées par la crise persistante en République démocratique du Congo (RDC).

Pour répondre à ces défis, la Communauté congolaise de Hamilton (CCH) et ses environs a organisé, le 10 mai, un atelier de réparation original intitulé Thérapie par la peinture. Cette initiative créative visait à apaiser, par l’expression artistique, les blessures vécues par les immigrants, tout en les soutenant dans leur parcours d’intégration. Soutenue par la Communauté francophone accueillante (CFA) de Hamilton, l’activité a été animée par l’artiste-peintre Crystalle Katanga et la formatrice en éducation spécialisée Ilda N’sele.

Avant de coucher leurs émotions sur la toile, les 15 participants originaires du Cameroun, de la RDC et de la Côte d’Ivoire ont bénéficié d’une formation animée par Ilda N’sele portant sur le tableau de régulation des émotions. Composé de quatre couleurs (bleu, vert, jaune et rouge), ce tableau permet d’associer chaque teinte à un état émotionnel précis. L’objectif de la séance était d’aider chacun à identifier la zone dans laquelle il se trouvait et à développer des stratégies pour atteindre la zone verte, symbole de calme, de confort et de bien-être.

Les personnes situées dans la zone bleue éprouvent souvent de la peur, de la tristesse ou traversent un état de malaise. Pour les aider à retrouver un mieux-être, il est conseillé de leur offrir des environnements calmes, d’écouter de la musique apaisante et de pratiquer des exercices physiques.

Dans la zone jaune, en revanche, les personnes ressentent une certaine agitation ou excitation. Pour favoriser un retour au calme, on peut utiliser différentes stratégies : respirer profondément, boire un grand verre d’eau, demander un câlin, échanger quelques mots avec quelqu’un et prendre le temps d’écouter sa réponse.

Enfin, les personnes se trouvant dans la zone rouge traversent une crise émotionnelle intense. Mieux vaut éviter toute tentative de dialogue à ce moment-là, car elles ne sont plus réceptives. Il est préférable de leur accorder du temps et de l’espace, tout en assurant une présence attentive et sécurisante.

Par la suite, les participants ont créé un collage de visages illustrant les différentes émotions présentées sur le tableau. Puis, au cœur de l’activité, ils ont été invités à exprimer leurs ressentis à travers la peinture. Chacun a choisi une seule couleur représentant l’émotion qu’il vivait à ce moment-là.

« Une dame a dit qu’elle ne savait pas dessiner. Je lui ai dit : Madame, prenez juste la peinture, faites tout ce que vous voulez avec une seule couleur. Elle a commencé à dessiner avec le bleu. Ensuite, elle m’a demandé si elle pouvait ajouter une autre couleur. J’ai répondu par l’affirmative. Elle est allée chercher du vert. Par cet acte, elle a démontré qu’elle était dans un état de peur parce qu’elle ne savait pas dessiner. Quand elle s’est sentie relaxée par la peinture, elle a voulu changer de zone et se situer là où elle se sentait mieux », a indiqué Mme N’sele.

« C’était une belle initiative, ajoute la Congolaise Mira Ekakola. J’ignorais que si je suis en colère, stressée, je devais prendre un crayon de couleur, un papier et dessiner. J’ai découvert ma propre zone d’émotion qui est le vert et le bleu. Maintenant je sais quoi faire pour maîtriser mes émotions. »

Après avoir exprimé les émotions enfouies en eux, les personnes immigrantes se sentaient transformées, plus légères et apaisées.

« Les participants ont appris des moyens simples pour retrouver la zone verte, celle du calme et du bien-être. Ces outils leur ont permis de renforcer leur espoir et leur estime personnelle », a souligné Nancy Muinda, présidente du CCH.

À l’issue de l’atelier, les nouveaux arrivants ont exprimé le souhait de revivre cette expérience, qui leur a apporté bien-être, réconfort et l’élan nécessaire pour poursuivre leur parcours d’intégration au Canada.

Photo  : Les visages collés sur les tableaux de régulation des émotions (Crédit : CCH)