Le 10 janvier en après-midi, le premier ministre du Canada s’est arrêté à l’Université McMaster, à Hamilton, dans le cadre d’une tournée à l’échelle du pays pour répondre aux questions des citoyens. Ces séances de questions-réponses permettent à Justin Trudeau de faire littéralement face à la population, un exercice sensé périlleux mais qui, en fait, s’avère assez bénin.
Cela est d’autant plus le cas sur un campus universitaire où la plus grande partie de l’électorat est sympathique au chef libéral. Néanmoins, comme c’est très souvent le cas lors de ce type d’évènement, des manifestants ont profité de l’occasion pour faire entendre leur point de vue. Une dizaine de militants pour la paix et l’environnement ont ainsi, à grand renfort de pancartes et de slogans, enjoint la foule qui s’apprêtait à rencontrer le premier ministre à l’interpeller sur des sujets aussi divers que la vente d’armement à l’Arabie Saoudite ou le nouvel oléoduc qu’Enbridge envisage de construire et qui passera par Hamilton.
Ces dossiers n’ont pas empêché le public de réserver un accueil chaleureux à Justin Trudeau. Après quelques mots de bienvenue et de présentation des députés libéraux Filomena Tassi et Bob Bratina, M. Trudeau a pris les questions du public au hasard.
Les mêmes thèmes revenaient fréquemment. La légalisation de la marijuana fut ainsi abordée à quelques reprises ce qui a permis au premier ministre de promouvoir à nouveau ses arguments en faveur de cette mesure, qu’il dit être une question de sécurité publique et non pas de revenus pour le gouvernement. M. Trudeau a rassuré l’assistance en se disant préoccupé par la santé des gens et en affirmant ne pas envisager que d’autres drogues soient décriminalisées dans un proche avenir.
La question de l’égalité homme-femme, un sujet prisé par le chef libéral, a aussi été abordée. M. Trudeau a expliqué que, selon lui, la nomination de femmes à des postes de direction, tant dans le secteur public que privé, ne relève pas de la gentillesse ou d’une idée abstraite de justice mais d’une gestion intelligente. Ce thème lui a également permis de mentionner des réalisations de son gouvernement pour faciliter l’avancement socioprofessionnel des femmes en ce qui touche aux congés de maternité et à la sensibilisation des entreprises à l’égalité des sexes sur les conseils d’administration.
Certains ont posé des questions plus critiques à l’endroit du gouvernement. Le sort de certains réfugiés déportés dans leur pays, la corruption morale des gens en autorité qui se défient des personnes marginalisées, la mainmise étrangère sur les compagnies canadiennes, etc., ont ainsi été portés à l’attention du public. Une question d’un participant sur la sécurité publique a donné l’occasion au premier ministre de rappeler qu’environ 60 personnes, résidant présentement au Canada, sont soupçonnées d’avoir apporté leur soutien à des activités terroristes à l’étranger et qu’elles sont étroitement surveillées par la police et les services de renseignement.
De manière générale, il n’est pas exagéré de décrire ces rencontres avec le premier ministre comme relevant des relations publiques dans ce qu’elles ont de plus triviales. Ceux qui s’attendent à une défense documentée et chiffrée des politiques gouvernementales seront déçus : la plupart du temps, M. Trudeau se contente de pétitions de principes précédées d’un long préambule consensuel et de quelques flèches décochées à l’endroit des conservateurs. Le mantra selon lequel « la diversité est notre force » revient de temps à autre de même l’évocation d’anecdotes personnelles.
Un incident est survenu au cours de l’activité alors qu’une participante en colère a invectivé le premier ministre à propos de la compensation de 10,5 millions $ versée à Omar Khadr. M. Trudeau a rétorqué qu’il comprenait le mécontentement éprouvé par la majorité de la population mais qu’en agissant de la sorte, son gouvernement a permis le versement d’une somme probablement moindre que si l’affaire eut traîné en cour.
Des confrontations de ce genre, il en survient immanquablement lorsqu’un premier ministre prend un bain de foule. Ces broutilles n’effraient guère les politiciens qui redoutent bien plus le grand rendez-vous électoral. En multipliant les évènements publics, M. Trudeau poursuit son offensive de charme pour se concilier la population à moins de deux ans de la date du scrutin.
PHOTO : Le premier ministre était présent à l’Université McMaster pour répondre aux questions de la population.