Le jeudi 15 juillet, Marcelle Lamoureux passait le cap des 100 ans. Les quelques autres Franco-Ontariens pouvant se targuer de cet âge vénérable ont peut-être eu, comme Mme Lamoureux, l’occasion d’entendre La Bolduc en personne, mais bien peu partagent avec elle le mérite de figurer au rang des pionniers.

En effet, pendant des décennies, cette dame originaire de Saint-Isidore-de-Prescott, dans l’Est ontarien, a été au coeur des activités de la communauté francophone de Brantford, y compris la fondation de l’école élémentaire Sainte-Marguerite-Bourgeoys.

La première école où Mme Lamoureux a enseigné

Son parcours a été, a priori, semblable à celui de bien des gens de sa génération. Des représentations théâtrales organisées par les religieuses de son village natal, Mme Lamoureux aura gardé un intérêt pour les arts. Lors des réjouissances familiales, à l’instar de ces nombreux musiciens amateurs que l’on trouvait alors dans bien des maisonnées, elle et un de ses frères jouaient de l’harmonica. Puis, lorsque vint le temps de joindre le marché du travail, c’est vers l’éducation qu’elle se tourna, devenant institutrice à la petite école d’une pièce qui se trouvait alors à Saint-Isidore-de-Prescott.

C’est cependant à Brantford que cette mère de quatre enfants s’est illustrée au chapitre de la promotion du fait français en Ontario. En effet, l’envie d’avoir une école francophone était partagée par plusieurs dans cette ville, mais aucune instance n’existait pour canaliser les efforts que les uns et les autres étaient prêts à investir dans ce projet.

Le 8 avril 1963, à l’invitation de l’Association d’Éducation, un organisme provincial militant pour les droits scolaires des francophones, elle entreprend alors de remuer ciel et terre pour rassembler un groupe prêt à se dévouer à cette tâche. C’est ainsi que, deux jours plus tard, 19 personnes se rassemblent chez elle pour jeter les bases de ce qui est devenu le Club canadien-français de Brantford.

Marcelle Lamoureux est aussitôt nommée présidente. De grandes responsabilités l’attendent alors. Pour faire croître le club, des centaines d’appels téléphoniques sont faits. Heureusement, les bonnes surprises s’accumulent : les fondateurs s’aperçoivent vite que les francophones sont plus nombreux qu’ils ne le croyaient à Brantford! Le 9 juin, une rencontre publique est organisée et 120 personnes répondent à l’invitation.

Le personnel de la résidence Telfer Place a souligné l’anniversaire de la nouvelle centennaire.

Sans que soit éclipsé le but premier du Club canadien-français qui était de doter la communauté de langue française d’une école, l’organisme s’est rapidement mué en club social. Les soupers de Noël, pièces de théâtre, parties de cartes, déjeuners mensuels, danses, tournois de hockey, épluchettes de blé d’Inde, etc., ont émaillé son existence. Ainsi, plusieurs se rappelleront notamment la participation du club au festival International Villages, qui mettait sur la sellette les diverses associations culturelles locales. En cette occasion, des tourtières et autres mets traditionnels étaient cuisinés et les élèves, en costume, se livraient à des danses d’antan.

Cette école vit justement le jour en 1977 (quoique ses racines remontent à 1974) après des années de travail acharné. Les francophones d’aujourd’hui oublient parfois le dévouement qu’il a fallu à ces pionniers pour que leurs communautés se dotent d’institutions qui leur soient propres. À Brantford, dans les années 1960, des enseignants ont même offert des cours en français pendant deux ans sans être rémunérés afin que le flambeau de l’éducation francophone ne s’éteigne pas.

Au centre de ces efforts pour conserver tout son dynamisme à la communauté, engagée dans maintes activités et de toutes les initiatives, se trouvait Marcelle Lamoureux. Elle a aussi été enseignante à l’école Sainte-Marguerite-Bourgeoys et, après sa retraite, y a fait du bénévolat pendant plusieurs années.

Considérant son grand âge, plusieurs l’ont connue autant dans ses années consacrées à l’enseignement et au militantisme que pendant sa retraite et peuvent témoigner que son sens de l’accueil ne s’est jamais émoussé.

C’est toujours avec enthousiasme et sans ménager les plaisirs de la table qu’elle recevait amies et visiteurs. Passionnée de jardinage, d’arts visuels (scrapbooking, peinture, calligraphie, etc.) de décoration intérieure, de cuisine, de couture, de crochet et de courtepointe, elle s’est aussi illustrée par ses nombreux talents.

Nombreux sont ceux qui ont de la reconnaissance à l’endroit de Marcelle Lamoureux. En 100 ans d’une vie bien remplie, elle a en effet eu d’innombrables occasions d’avoir un impact positif sur bien du monde!