Alors que la société sort progressivement de la léthargie à laquelle l’avait réduite la COVID-19, les musées, galeries et sites patrimoniaux reprennent vie à leur tour. En ce qui concerne ces derniers, Hamilton est riche en lieux et édifices représentatifs de l’histoire ontarienne.

Le site Web open.hamilton.ca, conçu et administré par la Ville, donne accès à une foule de données et d’informations sur Hamilton, y compris ce qui relève du domaine culturel. C’est avec surprise que l’on apprend que 9168 lieux et bâtiments sont classifiés à un degré ou un autre comme étant d’intérêt sur les plans historique ou architectural.

Dans la vaste majorité des cas, aucune protection n’est cependant en vigueur pour s’assurer que ces édifices ne soient altérés ou démolis. Une carte facile à consulter permet aussi d’explorer les différents secteurs de la ville et dans bien des cas de voir une photo de chaque lieu mis en valeur.

Bon nombre de ces édifices sont des résidences privées dont le style ou le grand âge attire subrepticement l’attention des promeneurs sans que ceux-ci ne sachent nécessairement quoi que ce soit de leur passé.

Le quadrilatère formé des rues Queen, Cannon, Wellington et de l’escarpement est particulièrement riche à cet égard : on y retrouve non seulement le centre-ville avec tout ce que cela comprend comme institutions mais aussi les « beaux quartiers » qui, bien que ne figurant pas au circuit touristique, n’en valent pas moins le coup d’œil.

Bien sûr, il existe aussi nombre de sites – dont la protection relève des gouvernements – qui sont offerts à la curiosité des visiteurs et des résidents de Hamilton. Le château Dundurn (qui inclut le Musée militaire et un jardin patrimonial), le Musée de la vapeur et de la technologie, la maison Griffin, le Centre patrimonial des arts ouvriers (situé dans la Hamilton Custom House), le Musée Erland Lee à Stoney Creek, etc.

Certains de ces sites ont explicitement fait connaître leur réouverture dès que l’occasion s’est présentée mais il est préférable de s’informer au préalable de leur accessibilité considérant les complications logistiques entraînées par la pandémie.

Malheureusement, au fil des ans, Hamilton a perdu plusieurs de ses sites d’intérêt malgré l’activisme des associations de défense du patrimoine. D’autres édifices intéressants pourraient disparaître considérant la législation en vigueur.

En effet, le règlement à cet égard délègue le pouvoir d’émettre des permis réguliers de démolition aux fonctionnaires municipaux. Il leur donne également le pouvoir de déterminer s’il s’agit d’une démolition de « routine ». En d’autres mots, le règlement n’exclut du processus que les édifices classés en vertu de la Loi sur le patrimoine de l’Ontario.

Encore là, des distinctions sont à faire : un bâtiment inscrit comme patrimonial bénéficie simplement d’un délai obligatoire de 60 jours avant que la démolition ne soit autorisée, ce qui donne l’occasion d’intervenir pour sa sauvegarde. Seuls les bâtiments désignés comme patrimonial sont pleinement protégés contre les démolitions ou modifications importantes.

Les municipalités, que ce soit la bureaucratie ou le conseil de ville, n’ont pas de pouvoir décisionnaire, en termes de démolition, sur un édifice inscrit ou désigné en vertu de la Loi sur le patrimoine de l’Ontario. Mais paradoxalement, c’est le conseil municipal qui est responsable de choisir quel bâtiment bénéficiera de la protection de cette loi. La majorité des bâtiments et autres structures historiques à Hamilton comme ailleurs sont officiellement inventoriés pour leur intérêt patrimonial mais ce statut ne leur accorde qu’une reconnaissance symbolique et la décision de les faire tomber ou pas sous le pic des démolisseurs repose entre les mains des fonctionnaires municipaux.

Déléguer pareil pouvoir entre les mains de fonctionnaires anonymes faisant leur travail loin des feux de la rampe a pour but de dédouaner les élus des controverses entourant la sauvegarde du patrimoine.

La logique marchande qui a envahi tant de champs d’activités favorise l’efficience administrative abstraite et le développement économique (peu importe qui en bénéficie réellement) aux dépens de l’attachement à la beauté et à l’histoire ressenti par nombre de citoyens.

En plus d’un changement substantiel à la législation, c’est donc un changement de culture politique et bureaucratique dont le patrimoine aurait besoin pour continuer à faire partie du paysage.

PHOTO – Le château Dundurn a réouvert ses portes au cours de l’été après des mois de confinement rigoureux.