Ottawa lance un fonds de contrepartie, en réponse aux explosions qui ont dévasté la capitale libanaise mardi, pour égaler les dons versés par les Canadiens jusqu’à un maximum de 2 millions $.
La double déflagration survenue dans le port de Beyrouth a fait près de 160 morts et 6000 blessés. Cette tragédie vient s’ajouter à la crise économique sans précédent que traversait déjà le pays, en plus de devoir composer avec l’accueil de plus d’un million de réfugiés et la pandémie de COVID-19.
La ministre fédérale du Développement international, Karina Gould, a annoncé samedi la création de ce fonds, qui s’inscrit dans l’aide de jusqu’à 5 millions $ promise au lendemain de la catastrophe.
Le gouvernement dit pour l’instant concentrer ses efforts sur la coordination avec des ONG et autres « partenaires de confiance » pour répondre aux besoins les plus urgents sur place, sans toutefois perdre de vue le travail de reconstruction qui s’impose à plus long terme.
« Nous avons appris beaucoup de leçons après la réponse au séisme en Haïti, a soutenu la ministre Gould en conférence de presse. C’est pourquoi nous encourageons les Canadiens à donner de l’argent et pas nécessairement envoyer des dons matériaux, parce qu’on on veut assurer que la réponse soit locale et que les acteurs locaux aient [la faculté] et le pouvoir de déterminer quels sont leurs besoins sur le terrain. »
Ainsi, pour chaque don effectué d’ici le 24 août par des particuliers à la Coalition humanitaire du Canada et à ses organismes membres, le gouvernement s’engage à verser un montant équivalent, jusqu’à concurrence de 2 millions $. Les dons versés depuis mardi dernier seront eux aussi égalés de manière rétroactive.
Née en 2005, la coalition réunit 12 organisations humanitaires, dont les branches québécoises et canadiennes d’Oxfam, Médecins du Monde, Humanité & Inclusion et Action contre la faim, afin de recueillir et redistribuer rapidement des fonds en cas de situation d’urgence.
L’organisme Save The Children, ou Aide à l’enfance Canada, fait également partie du lot. Son président et chef de la direction, Bill Chambers, souligne que tous les membres de la coalition sont bien implantés au Liban, certains depuis plusieurs décennies. « Ils sont déjà à l’oeuvre pour distribuer des vivres, réunir des familles séparées ainsi que fournir des soins médicaux et de l’hébergement d’urgence, entre autres. »
« Étant donné la COVID et la situation de longue date des réfugiés au Liban, nos équipes sont déjà actives sur le terrain. Elles n’attendent même pas que l’argent rentre, renchérit Denise Byrnes, directrice d’Oxfam-Québec. Donc l’argent va se rendre très rapidement. Et il n’y a aucune agence membre de la coalition qui va quitter le Liban après la crise. »
La tragédie n’aurait pas pu survenir à un pire moment, se désole Bill Chambers. Pas moins de 300 000 personnes se retrouvent aujourd’hui à la rue, dont 100 000 enfants, estime-t-on.
Dans l’immédiat, il est question de sauver des vies, a martelé la ministre Gould, en soulignant que le Canada s’engage néanmoins à assurer une présence continue au Liban bien au-delà de cette catastrophe.
« Nous ferons partie des conversations à l’échelle internationale pour voir comment nous pourrions contribuer à la reconstruction. »
Une rencontre de donateurs coprésidée par la France et les Nations unies a justement été convoquée par visioconférence dimanche. Le président américain, Donald Trump, a annoncé sa participation.
« Nous aurons besoin de voir aussi des importantes réformes économiques et politiques par le gouvernement du Liban », a toutefois ajouté la ministre, qui n’a pas voulu s’avancer davantage sur la légitimité du régime.
La contribution de 5 millions $ du gouvernement canadien devait également comprendre un montant initial de 1,5 million $ devant notamment être acheminé à la Croix-Rouge libanaise. Les 1,5 million $ restants demeurent à être alloués.
Entre-temps, le peuple libanais et sa diaspora continuent de faire entendre leur désarroi et de demander des comptes aux autorités, qui ont laissé des milliers de tonnes de nitrate d’ammonium dormir pendant plus de six ans dans le port de Beyrouth.
Au Canada, plusieurs dirigeants d’entreprises et leaders de la communauté libanaise se sont engagés à amasser au moins 2,5 millions $ pour la Croix-Rouge et de la Coalition humanitaire et « encouragent fortement le gouvernement canadien à contribuer à hauteur de ce montant ».
Les principales entreprises de télécommunications au pays ont toutes annoncé la suspension des frais pour les appels et SMS à destination du Liban jusqu’au 23 août 2020, afin de permettre aux Canado-Libanais de mieux communiquer avec leurs proches sur place.
Les services consulaires canadiens ont reçu 64 demandes d’aide au Liban.
SOURCE – Roxanne Ocampo, La Presse canadienne
PHOTO (crédit : compte Twitter de Karina Gould) – Le port de Beyrouth dévasté