La pollution et les espèces envahissantes semblent désormais constituer un écosystème en soi dans le port de Hamilton selon une nouvelle étude de l’Université McMaster. La santé des Grands Lacs soulève des inquiétudes depuis des décennies et les faits qui ont été mis au jour révèlent des développements inattendus à cet égard.
Le gobie à taches noires est un petit poisson arrivé dans les Grands Lacs par les eaux de ballast des navires. Il s’y est multiplié depuis à une vitesse foudroyante au détriment des espèces indigènes. Son agressivité explique en partie sa survie, mais aussi sa résistance aux polluants.
C’est cette dernière caractéristique qui a été découverte par des scientifiques de McMaster. Pendant 15 ans, ils ont étudié la population de gobies évoluant aux abords du port de Hamilton, où se trouve une forte concentration d’industries polluantes. Deux des sites étudiés se caractérisaient par la toxicité de leurs eaux tandis que quatre autres étaient considérés comme libres de contaminant.
Il appert que la population de gobies dans les eaux polluées est restée stable alors qu’elle a décliné ailleurs. Cette diminution en zones « propres » s’explique notamment par le fait que les espèces indigènes mettent un certains temps avant de reconnaître une espèce envahissante comme une proie. Le gobie à taches noires a évolué sans prédateur pendant un certain temps, se multipliant jusqu’à être facile à identifier par d’autres poissons qui ont ensuite appris à s’en nourrir. Ces poissons n’ont cependant pas la résistance du gobie aux produits chimiques, qui a ainsi pu trouver refuge dans les zones les plus toxiques de la baie face à Hamilton.
Mais les gobies sont aussi des prédateurs, et leur source alimentaire favorite est une autre espèce envahissante des plus connues : la moule zébrée. Le gobie et la moule zébré sont tous deux originaires de la mer Noire, au sud de la Russie.
En s’attaquant à ce mollusque, le gobie fait œuvre utile pour les humains, en faisant diminuer la population de cette espèce si dommageable pour les infrastructures marines. Or, cela n’est pas sans conséquence sur la chaîne alimentaire. En effet, les moules zébrées sont, règle générale, hautement contaminées par divers polluants. Ceux-ci se retrouvent dans l’organisme des gobies, puis, dans celui de leurs prédateurs, qui jusque-là n’avaient pas à en souffrir car ne se nourrissant pas de moules zébrées.
Les eaux baignant Hamilton se sont transformées, au fil des décennies, à certains égards de manières radicales. Le temps et d’autres études viendront clarifier l’étendue et la nature de ces changements et la part attribuable aux activités humaines.

Photo : la baie séparant Hamilton et Burlington est connue pour son paysage industriel.