Dimanche, 10 août : le soleil se levait sur la dernière journée du Festival de Blues de Kitchener, réanimant doucement une ville qui pendant trois jours déjà avait dansé et chanté sur un son rappelant la culture bigarrée du « vieux sud » des États-Unis. Un soleil qui d’ailleurs était là pour rester et taper dru sur une grande première : une programmation consacrée aux influences musicales cajuns et louisianaises.

Une longue portion de la rue King avait été fermée aux automobilistes et les inévitables cuisines roulantes et vendeurs en tous genres en occupaient une bonne partie. Mais alors que leurs kiosques déserts sortaient à peine des limbes en milieu de matinée, une scène sous une tente géante attirait à elle seule des centaines de spectateurs enthousiastes. Ce n’était pas tant pour le déjeuner communautaire gratuit que pour le spectacle de Diana Braithwaite, accompagnée de son fidèle guitariste Chris Whiteley et de deux autres musiciens, que s’était rassemblée cette foule. Dimanche oblige, le gospel fut à l’honneur, faisant miroiter le folklore de La Nouvelle-Orléans.

C’est ensuite le groupe Swamperella qui est monté sur la scène pour enraciner encore plus le public dans l’atmosphère et la riche culture de cette partie du monde où l’Amérique et les Antilles se confondent. Cette fois, ce sont les traditions musicales des Cajuns, ces lointains cousins de la grande famille francophone, qui ont soulevé l’assistance. « Soulevé » est bien le mot, car comme lors du spectacle précédent, bon nombre de gens n’ont pu résister à l’envie d’esquisser quelques pas de danse. Les mélodies cajuns, susceptibles de plaire à tous par leur exotisme et leur dynamisme contagieux, revêtaient un intérêt particulier pour les membres du public ayant le français pour langue maternelle.

En anglais ou en français, les chansons d’inspiration cajun devaient transporter les festivaliers tout au long de la journée, que ce soit avec Rosie Ledet et les Zydeco Playboys ou, en soirée, Michael Doucet et la formation Beausoleil. Le dimanche était consacré à la thématique louisianaise mais des artistes blues aux origines et aux inspirations les plus diverses s’y sont également produits. Face à l’hôtel de ville, la scène principale a ainsi accueilli des musiciens tels que Colin Linden et Jack de Keyzer tandis qu’un peu plus loin, au parc Victoria, se produisait des groupes tels que Joint Chiefs of Soul ou encore Blackie and The Rodeo Kings. 

Qu’est-ce que les festivaliers aiment dans ce type de musique? « La virtuosité des guitares, répond François Mallette, un des francophones présents. Le blues, c’est comme le jazz : c’est très varié. » En effet, certains s’étonneront de ce que des styles musicaux aussi divers soient présentés dans un festival consacré au blues, une musique que l’on pourrait croire davantage tournée vers la mélancolie. Mais comme toutes les musiques nées dans le creuset culturel américain, le blues est tiraillé entre diverses influences qui en font toute la valeur et qui n’ont sans doute pas fini de révéler leur potentiel et de faire de nouveaux adeptes. C’est sans doute pourquoi le Festival de Blues de Kitchener prend de l’ampleur à chaque année.

Photo : Le premier spectacle mettant en vedette Diana Braithwaite et Chris Whiteley.