« Il était une fois… » : tradition oblige, ainsi devait commencer le conte de Justine Gogoua qui figurait au programme de l’Association des francophones de Kitchener-Waterloo (AFKW) en ce samedi 20 février. L’organisme poursuivait de cette façon sa programmation dédiée au Mois de l’histoire des Noirs ou, comme l’artiste préfère l’appeler pour le rendre plus inclusif, le « Mois de l’héritage afro-canadien ».
C’est donc un conte du Mali, typique de la tradition orale africaine, que Justine Gogoua a raconté, entrecoupant le récit d’interludes chantés avec accompagnement au tambour. L’histoire mettait en scène Dankélé, un buffle de la savane entouré de courtisans qui exerçait un pouvoir tyrannique sur l’ensemble des animaux. Ceux-ci ne pouvaient boire dans la rivière qu’après lui. Un jour, une lionne ayant fait boire son petit par nécessité avant Dankélé dut payer de sa vie cette infraction à cette règle absurde.
Bien des années passèrent et le lionceau, devenu un lion sans peur, se rend à la cour du buffle-despote pour le confronter. Dankélé lui explique confusément que ce n’est pas lui qui a tué sa mère, mais la loi qu’elle a enfreinte. Le lion, n’ayant guère de goût pour les sophismes, règle son compte à Dankélé et règne depuis ce jour comme roi de la jungle, sans oppresser les autres animaux.
Faite pour les petits, cette historiette racontée en quelques minutes peut évoquer différentes analogies. « Le conte s’ajuste selon l’évolution de la société », mentionne Justine Gogoua qui s’est entretenue avec le public. Ainsi, il est facile de voir dans Dankélé la représentation de ces dictateurs africains modernes, certains rusés, d’autres déments, tous avides de pouvoir. Certains pourraient voir dans la rivière les ressources financières du pays dans lesquelles le tyran se serre le premier, et dans sa clique de courtisans la petite élite sur laquelle repose ce type de régime.
Quant à savoir qui sera le lion qui renversera cet ordre des choses, il reste hélas encore bien des pays africains où on l’attend. Quoique né du peuple, peut-être représente-t-il les citoyens ordinaires, la force vive d’une nation seule capable, en définitive, d’opposer une résistance de masse aux injustices.
Malgré les contraintes, l’AFKW a une programmation chargée cet hiver et, dans quelques semaines, l’organisme entamera le printemps avec son assemblée générale annuelle prévue pour le 1er avril. Ce sera l’occasion de faire le point sur la dernière année qui s’est passée presque exclusivement en ligne.
PHOTO – L’AFKW a fait appel à Justine Gogoua pour cette activité.