Intitulée Prisonniers de la glace, histoire, mystère et corps gelés, la nouvelle exposition bilingue du Musée d’histoire de Niagara Falls vogue, jusqu’au 22 avril, dans le sillage de la funeste expédition polaire de Sir John Franklin.

À la recherche d’un passage maritime reliant l’Europe à l’Asie, 128 membres d’équipage, leur capitaine britannique et leurs deux navires disparaissaient en 1845 dans le Grand Nord canadien.

Aux vaines expéditions de sauvetage du XIXe siècle se sont succédé les expéditions scientifiques du XXe pour tenter de remonter le fil de cette mystérieuse et macabre aventure qui n’a livré une grande part de ses secrets que tout récemment.

En 2014, une équipe d’experts de Parcs Canada mettait fin à une énigme vieille de 150 ans en localisant et en filmant, grâce à un véhicule sous-marin téléguidé, l’épave du HMS Erebus sombré dans les eaux glaciale de la Baie de la Reine-Maud et, deux ans plus tard, sur celle du HMS Terror au sud-ouest de l’île du Roi-Guillaume.

C’est sur cette île du Nunavut qu’ont été retrouvés des ossements d’une partie de l’équipage, fuyant les navires prisonniers des glaces. Leur analyse avec des moyens modernes concluait à une mort de faim et de froid précipitée par une contamination au plomb – provenant des boîtes de conserve stockées dans les navires. Pire, l’examen approfondi d’une anthropologue de l’Université McMaster à Hamilton corroborait en 1994 des récits inuits de l’époque : les rescapés avaient été contraints au cannibalisme pour augmenter leurs chances de survie.

Coproduite par le Musée des sciences et de la technologie du Canada, l’expo concentre plusieurs artefacts de l’expédition de 1845 et des instruments de marine d’époque qui placent le visiteur dans la peau de l’explorateur tout autant que de l’enquêteur.

Une vidéo décortique les recherches de Parcs Canada et une galerie d’œuvres d’art à base de collage présente les grandes figures de l’exploration polaire, du capitaine Cook au navigateur norvégien Roald Amundsen qui sera le premier à réussir la périlleuse traversée de la baie de Baffin à la mer de Beaufort, entre 1903 et 1905.

Si le franchissement du passage nord-ouest est devenu réalité, il a certes scellé la quête cartographique du dernier endroit connu sur terre, mais ne constitue pas l’épilogue de l’attention grandissante que portent les hommes à l’Arctique.

Aujourd’hui, plus et que jamais, cette zone géographique attise la curiosité des scientifiques qui en étudient l’écosystème, la géologie ou encore la culture inuit. Les chercheurs canadiens et du monde entier scrutent par exemple les changements climatiques à bord du brise-glace de recherche de pointe NGCC Amundsen.

Le passage du Nord-Ouest est aussi et surtout convoité par les grandes puissances qui lui portent un intérêt stratégique et économique croissant – au risque d’engendrer des tensions diplomatiques avec le Canada –, d’autant que le réchauffement climatique rend sa navigation de plus en plus sûre. Pour le meilleur et pour le pire.