La Fédération nationale des conseils scolaires francophones (FNCSF) est au pays des aurores boréales cette semaine pour réfléchir à son rôle et à celui de l’école. Elle en discutera pendant quelques jours à Yellowknife pendant son congrès annuel. Les congressistes prendront la mesure ce que le monde l’éducation doit faire pour assurer la pérennité du français dans ce que l’on appelle souvent le Canada anglais.
En regardant le programme, on se rend vite compte de l’ampleur de la tâche. On sait déjà qu’il n’est pas facile de faire de l’école un lieu d’apprentissage adéquat, même en milieu majoritaire. Qu’à cela ne tienne, on veut y parvenir en milieu minoritaire francophone. Mais, à ce défi déjà difficile à relever, elle ajoute une mission qui dépasse de loin le cadre de l’enseignement.
Par nécessité, puisqu’il s’agit de survie linguistique et culturelle, les conseils scolaires francophones visent un idéal beaucoup plus large, celui d’une école capable de toucher la société dans son ensemble.
Par quels moyens? La liste est longue.
Commençons par l’immigration, maintenant jugée indispensable pour le développement des communautés.
L’école doit être un outil d’intégration pour les immigrants francophones. Les conseils scolaires doivent les accueillir et les accompagner. Il faut envisager une éducation multiculturelle axée sur la célébration des différences et faire en sorte que ces nouveaux arrivants se sentent aussi à l’aise de dire « chez-nous » que le sont les Canadiens de souche. En d’autres mots, souhaiter la bienvenue ne suffit pas.
Passons maintenant à la communauté. Elle a besoin de beaucoup plus que le seul partage de la langue d’expression pour vivre et évoluer.
Conseils et écoles doivent donc organiser des activités qui débordent du cadre académique dans les arts, les sports et autres domaines. Il leur faut être inventifs pour y intégrer les Néo-Canadiens, avec leurs valeurs, leurs traditions et leur passé politique. L’école devient alors instrument de socialisation et de construction identitaire.
De plus, elle doit faire sentir à sa communauté que le fait français ne se limite pas à son patelin. Le francophone, où qu’il soit, fait partie d’un ensemble régional, provincial, national et international.
Enfin, elle est le clairon qui crie à la face du monde que le français est bien vivant dans sa communauté. Bien vivant, cela signifie qu’on le parle ailleurs qu’en salle de classe et dans les cours de français. On crée, on chante, on fait du sport, on s’intéresse à l’environnement, on lutte contre le harcèlement… Bref on vit en français avec tout que cela comporte. La langue n’est pas seulement expression culturelle, mais aussi celle de la société et de l’individu dans toute sa personne.
En résumé, le concept que la FNCSF envisage fait de l’école un instrument de développement social global, ce qui la distingue grandement de la mission d’apprentissage qu’on lui confie d’habitude.
On lui met sur les épaules la responsabilité de créer un environnement culturel riche et diversifié.
Cela nécessite une foi et un engagement profond de la part de tous : parents, conseils scolaires, enseignants etc. En d’autres mots, il faut croire profondément en sa culture.
Mais comment envisager tout cela quand on sait que les ressources sont souvent déficientes? L’école en milieu minoritaire doit faire davantage que les autres. Le gros bon sens dicte qu’à responsabilités et devoirs accrus, il faut compenser par un supplément, mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Dans plusieurs régions du pays, on en est encore à demander l’équivalence.
Les provinces se sont font souvent tirer l’oreille. On peut rappeler à cet égard le dernier jugement de la Cour Suprême de la Colombie-Britannique, rendu en septembre dernier, qui note bien des manquements à l’endroit de la minorité franco-colombienne.Un exemple parmi d’autres…
Réjean Paulin