Lors de l’atelier Réussir l’immigration et le vivre-ensemble, plusieurs acteurs du milieu francophone ont discuté des enjeux liés à l’accueil, l’intégration et la rétention des nouveaux arrivants en Ontario. Les échanges ont mis en lumière la complexité du défi démographique et social auquel fait face la province.

Olaïsha Francis – IJL

La question de l’immigration et du vivre-ensemble au sein de la francophonie ontarienne a été au cœur d’un atelier organisé récemment par des acteurs communautaires et des professionnels du milieu lors du Congrès annuel de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO). L’objectif de doubler la population francophone en 25 ans, afin d’atteindre une cible de 6 %, a été rappelé dès l’ouverture de l’atelier. Les participants ont souligné que cet objectif repose en grande partie sur l’immigration, tout en reconnaissant les défis économiques, sociaux et culturels que cela implique.

L’atelier été structuré en discussions circulaires inspirées des formats « bocal à poissons ». Cela consiste à mettre en place un débat où un petit groupe de participants se trouve au centre, appelé le « bocal  », pour échanger sur un sujet, pendant que l’auditoire les observe de l’extérieur. La parole a été donné à des citoyens, des professionnels et des représentants d’organismes régionaux pour partager leurs expériences et leurs perspectives.

Les discussions ont abordé des enjeux variés, notamment l’intégration économique, la reconnaissance des diplômes, le logement, la cohésion communautaire et le sentiment d’appartenance. Plusieurs ont également relevé que de nombreux nouveaux arrivants, venus en Ontario pour vivre en français, se heurtent à une réalité plus complexe dans un environnement majoritairement anglophone.

« Je vis dans la région de London et je constate que pour qu’un francophone puisse rester en Ontario, il doit sentir que le français est un atout, sinon il bascule vers d’autres choix », a témoigné Éric Sona, responsable de la stratégie et de la planification des services en français à Santé Ontario. Il a ajouté que la définition même du terme « francophone » reste souvent trop large pour refléter la diversité des parcours.

Le manque de sentiment d’appartenance a été évoqué à plusieurs reprises. Certains nouveaux arrivants disent avoir du mal à se sentir Franco-Ontariens, malgré leur intégration linguistique et sociale. « Il faut qu’on change notre perception : ce n’est pas parce que quelqu’un vient d’un pays francophone qu’il se sent nécessairement concerné par les enjeux de la francophonie », a expliqué Alain Dobi, directeur du Réseau en immigration francophone du Centre-Sud-Ouest. Il a rappelé que, pour plusieurs, la conscience d’être francophone s’est réellement développée après leur arrivée au Canada.

D’autres témoignages ont mis en lumière l’importance de la communication et de la sensibilisation. Fété Ngira-Batware Kimpiobi, de SOFIFRAN, a partagé son expérience d’immigration dans la région du Niagara, lorsqu’il y avait très peu de nouveaux arrivants étrangers. Elle a souligné que de nombreux immigrants ignorent les enjeux historiques entre francophones et anglophones en Ontario. « Ne nous demandez pas de comprendre des choses que nous ne savons pas. Si la lutte franco-ontarienne était mieux expliquée, nous aurions une meilleure compréhension de cette réalité », a-t-elle dit. Selon la directrice générale de SOFIFRAN, la transformation du visage communautaire du Niagara est en grande partie due aux efforts de dialogue et de rapprochement entre les groupes.

L’atelier a également abordé la question de l’emploi et des services d’intégration, de la navigation et de l’accueil des nouveaux francophones. Les participants ont convenu que pour atteindre les objectifs démographiques, il faut investir non seulement dans les structures et les services, mais aussi dans les mentalités et la perception de la francophonie dans les communautés locales et aussi dans les services d’informations pré-départ.

Cet échange s’inscrit dans une réflexion plus large sur l’avenir de la francophonie en Ontario et sur la capacité collective à bâtir un espace accueillant, inclusif et durable pour les nouveaux arrivants francophones.

Photo : Les participants à l’atelier sur l’immigration et du vivre-ensemble (Crédit : journal Le Régional)